Printemps à Londres...
En voilà un titre déce-vant, vous direz-vous à la fin de cet article... Ben non, pas de délicieux week-end outre-Manche pour moi, pas de balade enchanteresse dans les Kew Gardens, pas de relève de la garde, pas de tea party autour d'un Earl Grey ni de ces délicieux gâteaux que seuls les Anglais savent faire. Too bad...
Ce titre énigmatique, donc, cache une réalité bien plus prosaïque... Pour me faire bien comprendre, je dois remonter quelques années en arrière, jusqu'à une époque (finalement assez lointaine, bougre que le temps passe !) où j'admirais sans réserve le cahier de couture et de broderie réalisé par ma mère dans son école de jeune fille 'comme il faut'. Ce cahier qui fait aujourd'hui partie de mes petits trésors recèle entre ses pages épaisses les essais de plis, roulottés, cols et poignets ou encore smocks qu'il plaisait au professeur de ces jeunes filles d'exiger. La finesse des points, la précision des coutures, la patience et la méticulosité qu'elles supposaient, le rose passé du fin tissu de coton, tout me plongeait dans le ravissement. Pour la petite histoire, je dois avouer que j'ai fait tant et si bien que Maman a fini par me l'offrir, son cahier... Je crois - j'espère en tout cas - qu'elle l'a fait sans regret, sachant l'importance de ce cadeau à mes yeux. Et des années après, j'ai toujours le même plaisir à le feuilleter, et peut-être à rêver à cette jeune fille qui m'est si proche, et que je ne connais pas ?
Bref, l'envie de coudre et de broder me tient depuis plus longtemps que je ne m'en souviens. Pourquoi n'ai-je jamais sauté le pas ? Je ne sais pas. Est-ce que je préférais imaginer, me représenter ce que je pourrais faire ? Est-ce que je m'en contentais ? Sûrement... Ce n'est pourtant pas, ou alors très inconsciemment, la peur de mal faire, de faire moins bien que le modèle, je crois que c'est surtout la nonchalance très méditerranéenne qui me caractérise qui est la cause de cette si longue attente...
Ces trois dernières années, pourtant, l'envie de faire, le désir de toucher, de transformer, de voir naître des choses sous mes doigts ont été les plus forts. Ca a commencé par le tricot, que j'ai repris (ça, je savais faire), assez sporadiquement toutefois. Puis le point de croix. La broderie blanche, que j'adore, me tente terriblement mais je la laisse pour l'instant de côté. Plus tard dans l'année, peut-être ? Et enfin, la couture...
Je ne suis pas fille pour les cosmétiques, je ne le suis pas non plus pour la garde-robe (même si la mienne est... encombrante !). Je suis extrêmement fidèle à mes vêtements, le principe féminin qui veut qu'on achète trois tops, deux jupes, cinq paires de chaussures, etc. par saison ne vaut pas pour moi. Et puis... je ne trouve que si rarement des choses qui me plaisent, à un prix non stratosphérique, que si la banqueroute me menace un jour, ce ne sera pas pour cause de folies vestimentaires ! Mais combien de fois me suis-je dit : J'aimerais un truc comme ci, long comme ça, de cette couleur ci et de cette longueur là... sans, bien sûr, mettre un simple début de main sur l'objet de ma convoitise. Donc c'est simple, quand cette aubaine arrive, j'achète en double (sauf si on me demande la Lune pour le machin en question...) ! Et puis, la princesse est arrivée, telle un petit Zorro toute en boucles follettes et en bedon. Il faut en convenir, certaines tentations sont au-delà de la résistance humaine... Et la mode enfantine, enfin celle qui m'intéresse, est à se mettre sur la tête pour s'étonner avec les pieds comme le disait très justement Claudine, je crois (encore une référence vestimentaire, c'est un signe !).
Pour en finir (tout arrive...) avec cet interminable prologue, j'ai donc décidé que cette année me verrait dompter une machine à coudre. D'ailleurs, tous les horoscopes le prédisaient : 2007 verra vos talents créatifs se donner libre cours ! Donc, c'est pas ma faute, c'est la faute aux astres qui m'ont forcée à ouvrir mon catalogue de VPC et à commander (à - 20 %, tout de même, j'ai des enfants à nourrir et un mariage à préserver) ma merveille, mon Graal, ma machine !
Quand l'objet est arrivé, j'ai attendu 24 heures d'avoir le temps nécessaire pour ouvrir le carton avec tout le respect dû à son contenu... puis encore deux ou trois jours avant d'oser bobiner une canette. Fiasco total pendant 10 minutes, d'ailleurs, grâce à mon mari qui avait tripoté, fait tomber et remonté à l'envers le support de ladite canette ! Et enfin, deux bonnes semaines avant de faire ma première couture ! Moi l'impatiente, la tournicoteuse, la piétineuse, j'ai attendu. Et avec un certain plaisir d'anticipation, je dois bien le dire. Mais toute chose a une fin (cet article aussi, ne désespérons pas), alors j'ai pris mon courage à deux mains, le tissu de l'autre, et trace, et coupe, et taille, et épingle (deux fois, la faute à ce fichu polaire qui profite de la moindre occasion pour godailler, s'étirer, gondoler, vriller, que sais-je encore ??) et faufile... Et pique. Et le voilà, mon printemps à Londres : un plaid vert... vert (j'adore le vert gazon anglais, c'est ainsi), et un charmant Liberty pour lui faire pendant et sacrifier à la folie de l'année (qui me fait bien rire, vu que j'ai quand même l'âge suffisant pour avoir porté du Liberty à l'époque où les jeunes filles sages boutonnaient leur petit chemisier fleuri jusque sous le menton. La rage au coeur, souvent. Le détail est plaisant...). Elle a ceci de bien, soit dit en passant, qu'on trouve plus facilement ces tissus d'ordinaire assez difficiles à dénicher chez nous. Et j'en profite pour remercier Louva, qui m'en a gentiment ramené de sa récente escapade à Londres.
Ben oui, ce n'était que ça... deux bouts de tissu et quatre coutures droites ! Mon premier bébé, l'historique, le futur ancêtre, le défloreur de machine à coudre. Tout de même...
Et à la maison, je dois me battre pour en profiter un peu, de mon plaid douillet... Où va donc se nicher la rançon de la gloire, ça laisse rêveur !